Les Comités Culturels, lieux de participation citoyenne

Lors du festival Filmer à tout prix, le GSARA a initié, en collaboration avec les Comités Culturels, le projet de créer, former et encadrer un Jury citoyen. Ce dernier a décerné le Prix du “Regard bruxellois” au premier long métrage belge de son choix : Zone Zéro de Farzad Mouloudi.

Encourager la participation culturelle de tous passe par la mise à disposition de lieux permettant à chacun de créer, de partager et de confronter sa vision de la culture. Différents lieux existent à Bruxelles dont les Comités Culturels des CPAS. Penchons-nous sur celui de la commune d’Uccle avec son groupe de citoyens se réunissant tous les deux mois. Entretien avec Iris Marano, médiatrice culturelle et Etienne Jacquemin, coordinateur au CPAS d’Uccle.

Qu’est-ce qu’un Comité Culturel?

Iris : Lors de leur création, les Comités apparaissaient sous le nom de Comité de spectateurs. Les membres se réunissaient une fois par mois pour proposer et voter des activités culturelles à réaliser en groupe. Par la suite, une remise en question s’est faite autour de l’essence même des Comités : existent-ils en tant que spectateurs ou agissent-ils comme des activateurs culturels? Se limitent-ils à proposer des sorties ou peuvent-ils inviter au débat?

Il est important de signaler que les Comités Culturels dépendent des CPAS et qu’ils s’adressent aux personnes bénéficiaires du revenu d’intégration sociale. Chaque commune bruxelloise dispose d’un CPAS avec notamment une Cellule culture, qui est chargée de la promotion culturelle. Toutefois, seuls trois CPAS -Saint-Gilles, Ixelles et Uccle- ont formé au sein de leur cellule, un Comité Culturel. Ce projet a été mis sur pied avec le soutien de l’asbl Article 27, qui “se donne pour mission de sensibiliser, de faciliter la participation culturelle pour toute personne vivant une situation sociale et/ou économique difficile”.

Etienne : Le questionnement portait sur la nature même des Comités : encouragent-ils uniquement la démocratisation de la culture, à savoir son accès pour tous, ou également la démocratie culturelle, c’est-à-dire favoriser sa participation active? Les Comités Culturels se sont, dès lors, formés à partir du constat que les Comités de spectateurs ne se limitaient pas à la proposition d’un agenda culturel, ils portent également une réflexion critique sur la vie culturelle. Le Comité représente une porte d’entrée pour contribuer à la culture bruxelloise, ainsi qu’à la participation culturelle et citoyenne.

Yvan Leiva

Yvan Leiva

Comment fonctionne un Comité?

Iris : Je vais uniquement parler du Comité Culturel d’Uccle, car chaque Comité fonctionne à sa manière. Comme à l’époque des Comités de spectateurs, nous nous rejoignons pour proposer et discuter des activités culturelles auxquelles chacun souhaite participer. Nous essayons désormais de nous réunir dans un lieu culturel afin de finir la rencontre par une visite amenant au débat. Une fois l’agenda voté, il est envoyé à toute personne inscrite au CPAS de la commune concernée. Il informe des prochaines sorties ainsi que du lieu et de la date de la prochaine réunion du comité.

Un de nos souhaits principaux est d’offrir une mixité maximale au sein des Comités. Nous avons l’opportunité au CPAS d’avoir une grande diversité dans notre public, vu que les services proposés sont nombreux et variés. De plus, même si nous nous adressons principalement à nos membres, nous ne refusons personne sous prétexte qu’il n’est plus inscrit chez nous. Parce qu’il faut le rappeler, les CPAS sont un lieu de passage où les personnes n’y restent que pendant une période limitée, comme c’est par exemple le cas des étudiants.

La participation à un Comité est donc libre et volontaire, et chacun décide de la manière dont il souhaite exercer ses droits culturels. Un Comité ne pourrait d’ailleurs exister sans l’implication de ses membres. Un autre avantage des Comités tient également au fait que les participants décident eux-mêmes de l’utilisation des subsides, ce qui est assez rare dans notre système.

Le fonctionnement des Comités Culturels apporte donc une sorte de reconnaissance aux participants?

Etienne : Non, mais ils jouent ce rôle. Un des gros problèmes aujourd’hui est que la citoyenneté ne se manifeste plus que par son existence professionnelle, c’est-à-dire à travers les études ou le travail.

Iris : Or, les personnes au CPAS sont souvent des personnes qui pour différentes raisons ne peuvent travailler. Elles sont exclues du marché de l’emploi et parallèlement du meilleur endroit de socialisation. Des accidents de parcours peuvent pourtant arriver à chacun de nous avec des conséquences plus ou moins graves sur notre situation socioprofessionnelle. L’essentiel reste de rebondir. C’est là que se situent les Comités, en agissant comme un booster, nous allons aider des personnes qui n’arrivent pas à rebondir, à puiser en elles-mêmes les ressources nécessaires. Simplement en leur permettant de se confronter aux autres, d’exprimer leurs opinions ou leurs revendications, les Comités Culturels permettent une reprise de confiance en soi. Ils constituent finalement un des seuls endroits où nos bénéficiaires peuvent se sentir valorisés et s’épanouir. Ils ne devraient pas être un lieu de reconnaissance, mais le fonctionnement de notre société entraîne cet effet.

Quel serait l’objectif des Comités?

Etienne : L’objectif est d’encourager le développement d’un esprit critique, de permettre à chacun d’être acteur et porteur de culture. Ils sont une manière de se réunir pour produire de la culture. Le propre d’un Comité Culturel, c’est qu’il constitue un lieu de production culturelle où chacun décide de la manière dont il veut exercer ses droits culturels.

Propos recueillis par Roxanne De Smet