Comment taxer les géants du Web ?

Entretien avec Edoardo Traversa.

En marge de la réunion annuelle du F.M.I.1 le 18 octobre dernier, les ministres des finances des pays membres du G20 ont donné leur feu vert à des négociations cruciales et complexes au sein de l’O.C.D.E.2, dans le but de parvenir à un accord mondial sur la taxation des G.A.F.A.M.3, un enjeu majeur pour adapter la fiscalité mondiale à la numérisation de l’économie.

Edoardo Traversa est professeur de droit fiscal à l’Université Catholique de Louvain et expert pour la Commission européenne en matière de fiscalité indirecte. Quelques jours avant cet accord, il nous a éclairés concernant les enjeux et les difficultés de l’application de cette fameuse Taxe G.A.F.A.M.

En quoi la notion de propriété intellectuelle est-elle une clé pour comprendre la taxation à venir des géants du web ?

Aujourd’hui, les entreprises génèrent du revenu essentiellement au travers de ce que l’on appelle leur patrimoine immatériel. Il ne s’agit plus de ventes de produits manufacturés, par exemple de voitures, mais de droits sur la propriété intellectuelle que ces entreprises ont développé: marques, brevets, droits sur des logiciels… Cela est pris en compte dans la valorisation des entreprises. Ce n’est pas nouveau, pour certaines entreprises apparemment non digitales comme McDonalds ou Coca-Cola, la valeur de leur marque vaut plus que l’ensemble de la valeur de leurs biens corporels (magasins, bureaux…). A fortiori, pour Google ou Facebook actifs immatériels ont infiniment plus de valeur que les actifs matériels.

Logiquement, c’est devenu un enjeu très important de trouver des règles qui permettent de capter les revenus générés par ces actifs immatériels, des règles qui soient coordonnées au niveau international. Depuis les années 20-30, les règles développées au niveau international sont essentiellement basées sur la production de biens. D’autre part, à l’heure actuelle, en ce qui concerne la répartition du droit d’imposer entre les États, nous n’avons pas de critères qui permettent d’identifier les États qui pourraient taxer les bénéfices des géants du web.4

…à l’heure actuelle, nous n’avons pas de critères
qui permettent d’identifier les États qui pourraient taxer
les bénéfices des géants du web.

Il y a un problème de règles de localisation. De manière très schématique, les bénéfices d’une société sont taxés dans l’État où cette société est résidente, là où son centre de direction est établi et dans les États où elle a ce qu’on appelle un établissement stable: un restaurant, un bureau ou du personnel sur place. Bien souvent, les géants du web n’ont ni locaux, ni personnel en suffisance dans les États où ils sont actifs. Les bénéfices générés dans ces États d’activité ne sont donc pas taxés. D’autre part, l’état de résidence peut-être un paradis fiscal ou simplement considéré que ces bénéfices étrangers ne sont pas taxables sur son territoire.

En quelques années, les grandes capitalisations boursières sont devenues les G.A.F.A.M. dont les avoirs sont basés sur ces avoirs dont nous parlions. Selon vous, quelles seraient les grandes lignes pour changer ces règles et les adapter à l’ère numérique ?

Pour le moment, deux voies sont poursuivies. Soit on change la manière dont sont imposées les sociétés à l’international en trouvant de nouveaux critères pour permettre à l’État d’activité (où les revenus sont générés) de taxer ces revenus. Cela semble être la piste préférée au niveau de l’O.C.D.E. et des organisations internationales. Deuxième option, et c’est la piste prise par la France, on se focalise sur les opérations réalisées par ces sociétés, comme les paiements, et on instaure un impôt opération par opération. Par exemple, si une entreprise belge paie Google pour apparaître prioritairement dans les résultats de recherche, ce paiement fera l’objet d’une taxe.

Évidemment, l’idéal est d’arriver à une solution générale, qui touche l’ensemble des opérations réalisées par ces sociétés, et globales, qui touchent le monde entier. Ces jours-ci, l’O.C.D.E. et l’Union européenne essaient de trouver un consensus qui modifierait les règles de la fiscalité internationale, accorder tout le monde sur la notion de présence taxable dans un État pour des entreprises digitales5. Si ce consensus ne peut pas être trouvé, il va falloir choisir une voie théoriquement moins satisfaisante, soit la voie française qui consistera à lister les services digitaux qui feront l’objet d’une taxe spéciale. Fin 2020, s’il n’y a pas d’accord international, la Commission européenne se propose de suivre cette voie. Celle-ci a deux limites: d’abord, la liste est fermée. Pour l’étendre il faut à nouveau changer la loi. Ce n’est pas très pratique dans la mesure où l’on ne connaît pas le futur des services digitaux. Ensuite, si on manque de coordination entre les États, il se peut que certaines opérations échappent aux taxes ou soient taxées plusieurs fois. En effet, le champ d’application de certaines règles s’avère parfois beaucoup plus large que ce qu’on ne croit, et en visant certaines opérations spécifiques, on va nécessairement inclure dans les entreprises visées d’autres que celles auxquelles on pensait.6

On ne peut pas faire des lois spécifiques à Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft, le champ d’application sera défini largement. On dira: « Les entreprises qui vont opérer sur le marché des services digitaux » par exemple. Mais ça voudrait dire aussi que n’importe quelle start up européenne en plein développement pourrait être impactée ! Par conséquent, on essaie de mettre une limite pour qu’en dessous d’un certain chiffre d’affaires, certaines entreprises ne soient pas touchées. Au niveau international, il faut s’assurer que de multiples impositions ne nuisent pas à de potentiels futurs concurrents des G.A.F.A.M.

Prenons un exemple: si une société française achète de la publicité sur Facebook mais souhaite la diffuser en Allemagne, quel pays taxerait Facebook sur l’opération ?

Dans l’option prise par la France pour le moment, où l’on taxe le chiffre d’affaires, si une entreprise française paie Apple sur son compte en Irlande pour de la pub en Allemagne, la taxe pourra être perçue par la France. Si on dit que l’important est le lieu où la publicité est diffusée, et donc là où la majorité des utilisateurs qui ont vu la pub sont localisés, alors l’Allemagne taxera l’opération. Cet exemple montre bien qu’en l’absence de coordination internationale, si la France utilise le critère du lieu source du paiement et l’Allemagne le critère du lieu d’effet, cette opération serait possiblement taxée deux fois.

En mars, il y a eu arrêt du projet de taxation européenne des G.A.F.A.M., parce que l’unanimité est nécessaire dans l’Union européenne en matière de fiscalité pour des réformes européennes. Mais la Suède, le Danemark, l’Irlande et la Finlande ont bloqué le processus. Pourquoi cela ?

Les raisons ne sont pas toutes les mêmes. Apple est installé en Irlande. Logiquement, l’Irlande a eu peur que, suite à l’instauration d’une taxe européenne, Apple décide de quitter l’Union européenne, et donc de quitter l’Irlande. Certaines entreprises digitales, moins grosses que les G.A.F.A.M., sont installées dans les pays nordiques. À ma connaissance, ceux-ci étaient plus préoccupés par la manière dont cette taxe était construite et qu’elle risquait de créer beaucoup de problèmes pour finalement peu de recettes.

En 2018, la commission a évalué que cette taxe allait générer un revenu de 5 milliards d’euros pour tout le territoire de l’Union européenne. Pour donner une comparaison, 5 milliards d’euros par an, c’est un vingt-cinquième des recettes fiscales belges. Au niveau de l’Union Européenne c’est ridiculement bas. Adopter un impôt, ça coûte cher. Ici, ça coûte politiquement à cause des États-Unis mais ça coûte aussi administrativement. C’est un argument qui mérite d’être réfléchi. Plutôt que d’instaurer tout un impôt européen pour 5 milliards d’euros pour tout le territoire de l’Union européenne, c’est plus facile d’envoyer une lettre aux G.A.F.A.M. en leur demandant cinq milliards sans contrôle fiscal !

D’autant plus que, durant les négociations, le projet de la commission avait été restreint pour trouver un accord. Certains types d’opérations avaient été éliminés, notamment le fait de permettre l’utilisation de certaines bases de données. Ce n’était pas juste une question de volonté politique, mais de mise en œuvre technique. Il ne s’agit pas de taxer à tout prix pour se retrouver avec des règles mal faites, contraires à des traités internationaux, contraires à des traités sur le fonctionnement de l’Union européenne, ou des règles impossibles à mettre en œuvre par les administrations.

Donc, vous-même vous considérez que le projet n’était pas mûr en mars.

Oui, et surtout il était tellement réduit… En ce moment, Trump a fait une ouverture sur la taxation du digital, l’O.C.D.E. est en train d’avancer. Franchement, une solution globale, incluant au moins l’U.E. et les États-Unis, est préférable à une solution unilatérale. Et puis les géants du web chinois arrivent, et avec eux bien plus que des problèmes fiscaux, mais des questions de sécurité des données et de surveillance. Pour le moment le sujet au niveau international, c’est de trouver le moyen de taxer le bénéfice mondial de ces groupes multinationaux et donc de trouver des règles de répartition entre États qui soient acceptables pour tout le monde. L’idée de base est de redistribuer davantage aux États où se trouvent les marchés de ces entreprises, là où se trouvent les utilisateurs, les consommateurs, où est en fait localisée la véritable création de valeur.


L’idée de base est de redistribuer davantage aux États
où se trouvent les marchés de ces entreprises,
là où se trouvent les utilisateurs, les consommateurs,
où est en fait localisée la véritable création de valeur.

Au niveau de la répartition, le bénéfice généré par des activités « normales », qu’on peut facilement évaluer, on va continuer à l’attribuer aux pays où l’activité est localisée. Par exemple, si j’ai une entreprise qui coupe du bois avant de l’exporter, sur la base des prix du marché, on peut facilement savoir ce que rapporte la vente d’un stock de bois coupé et donc à quoi correspond la valeur de l’activité. Dans ce cas, l’entièreté du bénéfice lié à activité continuera à être taxé dans l’État où se trouve l’usine.

Mais certaines activités sont beaucoup plus difficiles à évaluer, notamment la publicité online. Google est un annonceur incomparable, les règles habituelles ne fonctionnent pas. Le fait que Google soit dans une position de quasi monopole génère un bénéfice excédentaire qui, dans le nouveau système, va être réparti selon de nouvelles règles. Ce serait la première étape, distinguer le bénéfice habituel d’une entreprise «normale» et le bénéfice supplémentaire à répartir selon des nouveaux critères.

Ensuite, on va regarder quels sont les États qui ont droit à leur part du gâteau. Déjà il faut qu’il y ait des utilisateurs de Google sur le territoire puis on va se demander comment travailler: en termes de nombre d’utilisateurs ? En termes de bénéfices générés sur le territoire ? L’idée est plutôt de se baser sur les ventes. La France, par exemple, s’est basée sur le bénéfice généré sur le territoire français. Dans ce cas ne pourraient participer à la répartition du gâteau que les États où ces sociétés génèrent un minimum de bénéfices. Si Google réalise 1% de ses ventes mondiales en Belgique, la Belgique aurait le droit de taxer 1% du bénéfice excédentaire de Google.

Pour revenir aux droits de propriété intellectuelle, est-ce que leurs revenus seront taxés ?

Oui bien sûr, mais on ne se basera plus sur le lieu, l’État où ces droits sont localisés pour attribuer le bénéfice. Actuellement, pourquoi est-ce que l’Irlande centralise autant le bénéfice d’Apple ? Parce que les droits de propriété intellectuelle, marques, brevets, sont localisés en Irlande et donc, chacun des revendeurs d’Apple dans d’autres pays paie pour l’utilisation de la marque. Ce type de paiement fait disparaître du bénéfice imposable dans les États où Apple vend, où Apple est actif ! On ne veut plus que le lieu où est localisée la marque ait une incidence fiscale. C’est ça l’idée.

On ne veut plus que le lieu où est localisée la marque
ait une incidence fiscale. C’est ça l’idée.

Par rapport à ce qui s’est passé cet été en France, ils ont décidé d’anticiper, de prendre 3% du chiffre d’affaires et qu’après l’instauration de la taxe GAFAM ils ne taxeront pas lors des premiers temps jusqu’à ce que l’équilibre soit atteint. D’abord les U.S.A. ont mal réagi, avant que Donald Trump ne se ravise. Quelle est la position des Etats-Unis là-dessus ?

L’administration Trump est dans une situation bizarre. En tant qu’américains, ils se doivent de défendre les entreprises américaines, mais en même temps, entre Trump et les industries digitales aux États-Unis c’est la guerre. Trump, à la fois comme magnat hôtelier et républicain, fait financer ses campagnes par le secteur du pétrole, des armes, des automobiles. Les entreprises digitales et le monde de la finance sont plutôt démocrates. Ainsi, Trump n’aime pas que les entreprises américaines soient taxées mais en même temps, en interne, il essaie d’attaquer les entreprises du digital à chaque fois qu’il le peut. C’est ce qui explique pourquoi Trump s’est d’abord érigé contre Macron avant d’être moins virulent dans un second temps. Et puis, de manière générale la politique étrangère des États-Unis n’est pas basée sur le fait de conclure des traités dans une approche multilatérale. Par exemple, il existe depuis quelques années un mécanisme d’échange automatique d’informations bancaires entre 150 États dans le monde y compris à l’intérieur de l’Union européenne. Ceci est né sous Obama, le congrès américain a voté une loi disant que toutes les banques du monde entier devaient envoyer au fisc américain des informations sur les comptes détenus par des ressortissants américains. Ceci, sans s’embarrasser d’accords internationaux. En Europe, on aurait crié « La territorialité ! La souveraineté des États ! ». Les États-unis, eux, ont mis le monde devant le fait accompli. Néanmoins, ça a lancé une dynamique multilatérale positive dont les autres États se sont inspiré pour venir à un accord multilatéral d’échange d’informations.

Pour revenir à la taxe G.A.F.A.M., après le rejet de mars, le dossier a été confié à l’Organisation pour la Coordination et le Développement Économique (O.C.D.E.), qui y réfléchit sous l’angle d’une « approche unifiée »…

L’O.C.D.E. c’est péjorativement ce qu’on appelle un « club de pays riches ». Plus précisément, il s’agit d’une association qui réunit les États industrialisés et qui leur propose toute une série de services en termes d’analyse des politiques dans différents domaines. Depuis 60 ans, l’O.C.D.E. constitue un forum de discussion en matière fiscale et a développé une expertise que les autres organisations internationales n’ont pas. Un de leurs faits d’armes est la création d’un traité modèle duquel les États peuvent s’inspirer lorsqu’ils souhaitent conclure entre eux des conventions préventives de la double imposition. Aujourd’hui, c’est devenu pratiquement un standard de référence au niveau mondial.

Il y a quelques années, le G20 a demandé à l’O.C.D.E. de réfléchir à un moyen de limiter l’évasion fiscale des multinationales. Le résultat, le plan B.E.P.S. (Base Erosion and Profit Shifting) a été un succès. En effet, l’O.C.D.E. a fait adopter une convention multilatérale contenant des mesures anti évasion fiscale a beaucoup plus d’États que d’États membres de l’O.C.D.E., y compris par l’Union européenne au travers d’une directive. Poursuivant sur sa lancée, l’O.C.D.E. a continué à travailler contre l’évasion fiscale des multinationales en focalisant sur le digital et la manière de taxer les entreprises digitales. Mais cette organisation peut juste proposer aux États d’adopter un accord, elle n’a aucun pouvoir décisionnel.

L’approche unifiée ça veut dire simplement qu’il y avait différentes approches sur la table et l’O.C.D.E. essaie d’en faire une synthèse, c’est tout. Pour le moment, les détails, soit l’essentiel, ne sont pas décidés. Comme nous en avons parlé, la structure de base est de regarder le bénéfice mondial, enlever ce qui est du bénéfice dont la localisation n’est pas contestée, et pour le reste, le faire selon des critères pré-déterminés entre États légitimes à participer à ce bénéfice.

Comment le profit de cette taxe sera-t-il redistribué ? Vous pensez qu’il faut privilégier le nombre d’utilisateurs ? C’est à la connexion ? Comment cela sera-t-il quantifié ? En plus, les GAFAM sont très opaques sur leurs chiffres, comment une taxation est-elle possible ?

L’opacité, si à un moment un État demande de fournir des informations dans le cadre d’une déclaration fiscale et que les G.A.F.A.M. refusent, il y aura des amendes. Si une grande partie des États du monde décide de les taxer, les G.A.F.A.M. devront fournir des informations qui, pour le moment, ne sont pas publiques ou accessibles aux administrations fiscales.

En ce qui concerne les critères de redistribution, ils ont tous des limites. Si on prend en compte le nombre d’utilisateurs, tous ne sont pas aussi actifs ni ne génèrent autant de bénéfices l’un que l’autre. Un autre critère possible est le lieu du paiement, sauf que je peux tout à fait imaginer que je fasse un paiement depuis les Bermudes pour une pub qui sera visionnée en Allemagne… Il faudra certainement combiner les facteurs en fonction du type de business. Maintenant pour le reste, on peut se baser sur les ventes, quitte à corriger si vraiment il y a des déviations inattendues de consommateurs d’une année à l’autre, on voit qu’on vend beaucoup moins dans un État que dans un autre…

Plus le gâteau sera grand,
plus il y aura des bénéfices à répartir.

Et pour ce qui est de la géolocalisation, dès lors que les G.A.F.A.M. ont ces données, il faut que ce paiement soit rattaché à l’endroit où le service a été consommé, si c’est un service de publicité. En matière de T.V.A., pour localiser, on utilise des faisceaux de critères: l’adresse IP, le lieu de résidence de l’utilisateur etc. On peut se baser là-dessus pour commencer. Maintenant, certains petits États ont peur qu’avec ce type de mécanisme ils perdent du bénéfice imposable parce que les grands États ont des gros marchés, les petits États ont des petits marchés… En Irlande et aux Pays-Bas par exemple, deux endroits où il y a beaucoup de holdings de sociétés multinationales, il y a donc beaucoup de bénéfices qui sont localisés là-bas. Plus le gâteau sera grand, plus il y aura de bénéfices à répartir. Mais il faudrait éviter qu’avec le nouveau système un État qui avait une base imposable de 100 se retrouve avec une base imposable de 50 d’un jour à l’autre, parce que l’État utilise cet argent pour les services publics ou autres. Il faut des mesures transitoires.

Est-ce que cette approche prenant en compte le bénéfice mondial ne va pas renforcer le monopole des G.A.F.A.M., encore plus cadenasser la concurrence ?

La commission va tenter de ne taxer que les « tout gros »: seules les sociétés qui ont plus de 750 millions de chiffre d’affaires seraient soumises à la taxe qu’elle a proposée. Ceci pour éviter que cette taxe nuise à de petits acteurs. Aucun système n’est parfait.

Pensez-vous que cette unification signifie aller vers la fin de la territorialisation ? Est-ce le début d’un autre modèle ?

Ce qui est le plus important, c’est que les taxes soient établies sur la base de réalités. Quand la réalité d’une société multinationale c’est d’avoir un bénéfice mondial, on doit prendre en compte cette réalité. Ceci dit, les recettes fiscales seront toujours territorialisées, parce que les dépenses sont territorialisées, on fait la même chose en Belgique avec les communes. Il faudra trouver des critères, mais ce qui est le plus important maintenant, c’est de faire en sorte que l’entièreté du bénéfice de ces multinationales soit repartie. Et pas qu’une partie disparaisse dans un trou noir.

Propos recueillis et mis en forme par Olivier Grinnaert.

1 Fonds Monétaire International.

2Organisation pour la Coordination et le Développement Économique

3 Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft

4 Le 18 octobre, l’O.C.D.E. a proposé un début de réponse et prévoit un système pour déterminer si oui ou non un pays pourra imposer une multinationale, ceci en fonction du chiffre d’affaires de l’entreprise.

5 De nouveau, l’O.C.D.E. stipule d’ores et déjà que les multinationales visées seront celles qui « ont une interaction significative avec les consommateurs finaux ». En revanche, seraient exclues celles qui n’ont pas de lien direct avec le public, comme par exemple les équipementiers automobiles, qui vendent leur production à des fabricants. Reste à définir clairement ce qu’est une « interaction significative »…

6 Dernière mise à jour, l’O.C.D.E. propose de fixer une « garantie juridique » pour les multinationales avec un mécanisme d’arbitrage en cas de litige entre États et grands groupes, afin d’éviter une double imposition.